Vaccin antigrippal à ARNm : un pas de plus vers une vaccination ciblée – MediQuality
BRUXELLES 13/08 – La société Moderna a récemment annoncé des résultats positifs
concernant les essais cliniques de son vaccin antigrippal à ARN messager. En quoi cette
nouvelle change-t-elle la donne en matière de stratégie vaccinale ? L’analyse du Pr.
Nicolas Dauby, infectiologue au CHU Saint-Pierre.

Le 30 juin dernier, Moderna annonçait avoir obtenu des résultats positifs pour son
candidat-vaccin antigrippal lors d’une vaste étude de phase 3. Dans son communiqué, la
société de biotechnologie américaine indiquait que son vaccin à ARN messager (ARNm)
avait démontré une efficacité relative supérieure à celle d’un vaccin contre la grippe
saisonnière déjà autorisé à dose standard chez les adultes de 50 ans et plus.
Des résultats prometteurs
Pour le Pr. Nicolas Dauby, infectiologue au CHU Saint-Pierre, cette information est
incontestablement une bonne nouvelle. « On ne dispose pas encore d’assez de données
pour juger de son efficacité réelle. Mais les vaccins à ARN messager ont déjà montré leur
capacité à induire des réponses anticorps plus fortes que les vaccins dits classiques »,
souligne le Pr. Nicolas Dauby. « C’est clairement une étape importante dans la prévention
de la grippe et cela ouvre la voie à une vaccination combinée grippe-covid, même s’il est
un peu prématuré d’en parler ». En outre, ce type de vaccin présente l’avantage potentiel
de correspondre plus précisément aux souches virales en circulation. Il permet dès lors en
théorie une réponse rapide en cas de future pandémie.
Vers une prévention plus personnalisée
Cette technologie vaccinale est-elle dès lors amenée à détrôner les vaccins antigrippaux
plus classiques ? Le Pr. Nicolas Dauby ne le pense pas. « Bien qu’efficaces, ces vaccins sont
aussi plus réactogènes, et sont associés à des douleurs ou de la fièvre, ce qui limite leur
utilisation dans la population générale. Il est en tout cas trop tôt pour envisager de les
préconiser à tous ». Selon l’infectiologue du CHU Saint-Pierre, ils représentent en revanche
un atout pour les patients fragiles, âgés ou présentant différentes comorbidités. « Les
stratégies de vaccination actuelles ne sont pas optimales en ce qui les concerne. En
Belgique, des vaccins à haute dose ou adjuvantés sont toutefois remboursés à certains
patients à risque. Les vaccins à ARN messagers vont contribuer à affiner la stratégie de
prévention antigrippale en la rendant encore plus personnalisée et plus adaptée au statut
immunitaire des populations vulnérables ».
Une décision qui inquiète
Dans ce contexte, la décision récente du secrétaire d’État américain à la santé, Robert F.
Kennedy Jr, de mettre fin à la plupart des aides fédérales au développement des vaccins à
ARNm inquiète. Sont notamment concernés les programmes de recherche sur les vaccins
contre la grippe aviaire H5N1, potentiellement transmissible entre humains. « Cette
technologie permettrait de produire en masse et rapidement des vaccins adaptés à la
souche, comme on l’a vu avec le covid. Cette décision est donc dramatique, non seulement
pour les États-Unis, mais aussi pour la santé au niveau mondial » se désole le Pr. Nicolas
Dauby.